• Aujourd'hui j'ai pleuré.
    J'ai vu parler dans un film-documentaire un meurtrier comme jamais l'humanité n'en aurait conu il y a cent ans, un meurtrier légal, comme il y en a toujours eu. Un meurtrier qui est à la fois un donneur de millions de morts, et un symbole de réussite sociale.
    Un PDG.
    Ou comment se faire passer pour un libéral quand on n'est qu'une machine de mort dont chaque mot dégoulinant de ce qui lui sers de bouche pue tel le charnier que laisse l'industrie qu'il gère dans les pays qu'il a investit.
    Peter Brabeck.
    Lucide, pourtant. Fier défenseur du développement des pays pauvres, bien entendu.

    Nestlé, comme il dit, a bien plus aidé les pays pauvres que ne le feront jamais les dons inutiles des ONG aux idées extrêmes : vous rendez-vous compte, ces ONG défendent l'idée extrême de l'accès à l'eau pour tous !
    Putains de gauchistes.

    Je ne défends pas ces ONG. Moi non plus.
    Donner de l'argent et de la bouffe n'a jamais rien changé et ne changera jamais rien.
    Ce sont les idées qu'il nous faut attaquer, les idées qui semblent découler des cours de Sciences Po et de l'ENA. La logique libérale qui, je l'imagine parfaitement, fait qu'un homme sortant de ces écoles avec le moindre rêve est perçu comme un réactionnaire par les autres dirigeants, un ennemi du Progrès.

    Créons des richesses ! Libre échange !

    Créer des richesses...
    Aujourd'hui l'agriculture mondiale peut nourrir sans aucun problème 12 milliards d'humains. Je ne vais certainement pas me lancer dans ce genre de statistiques adulées par les altermondialistes qui demandent à l'Etat d'empêcher les méchants Capitalistes aux chapeaux haut-de-forme d'exploiter la planète : revenons à une exploitation modérée ! Une faim moins criante ! Un peu plus d'eau ! Ou alors moins de films-spectacles !
    Laissez-nous un Monde dans lequel nous, étudiants, pourrions diriger sans trop de mauvaise conscience !
    Nous râlons, nous sommes bougons, c'est un peu dommage de devoir se tuer pour diriger. Enfin, passé la crise, nous le ferons quand même.

    Il n'empêche que nous produisons le double de nourriture nécessaire à l'alimentation de la totalité des êtres humains, c'est un fait.
    Et ils voudraient créer des richesses. But affabulateur, Profit vainqueur, nous n'accepterons jamais une telle chose.

     Le libre échange est un formidable mensonge qui me ferait rire s'il n'accaparait déjà pas mes larmes de rage.
    Quel liberté, quelle justice y'a-t-il dans un échange entre Coca-Cola et un syndicat colombien ?

    Quelle justice y'a-t-il quand le blé de l'Europe provient en majorité de l'Inde alors qu'une petite moitié de la population indienne souffre de la faim ?

    Votre société si parfaite, qui se veut accessible, qui se veut incroyablement confortable, n'est qu'un ramassis de monstruosités que l'on peut gouverner, si tant est que l'on est un cynique ou un rampant.

    C'est parce que les privilégiés, les libéralistes, n'ont pas compris le lien direct de leur jouissance et de la souffrance des peuples, que lorsque dans une grande propriété des Seychelles, une bande de jeunes garçons excités égorgera à la machette un bel homme bronzé aux UVs et aux dents brillantes, il se trouvera toute une fange de gens dans l'incompréhension la plus totale, devant l'assassinat de cet homme si bon, si doux, qui donnait quelques dizaines d'euros aux habitants des bidons-villes de Haïti chaque mois.
    Car il se trouvera un jour où, fatigués d'osciller entre les discours mortifères des dirigeants cyniques et les textes désespérés d'intellectuels occidentaux impuissants à faire la moindre chose, les opprimés du monde entier soulèveront leurs corps élimés par des vies de manque et s'en iront sortir les fourches et les clefs à molette, en les saisissant d'une façon singulièrement différente de d'habitude.


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  • A la mode Anaryax, je mets mon bulletin scolaire, parce qu'après m'avoir désespéré, au final, en y réfléchissant, il me plaît bien.

    BULLETIN DU TROISIÈME TRIMESTRE.


    FRANCAIS : 9,2. Des résultats qui, encore une fois, ne signifient rien dans la mesure où ***** refuse de traiter un devoir et bâcle les autres.

    Oui, je refuse toujours de répondre à ses interrogations de lecture, parce que je refuse de lire ses livres imposés. J'en ai lu quelques uns quand ils m'intéressaient et j'ai répondu à certains contrôles pour que l'insoumission ne m'empêche pas d'aller en bac pro, mais sans plus. Oui, je bâcle, je suis paresseux face à l'inutile.

    HISTOIRE GÉOGRAPHIE : 3,0. DES DIFFICULTÉS ET DES PROBLÈMES IMPORTANTS. ECJS:E!....EN CONFLIT TOTAL AVEC L'ECJS.

    Je vous retranscris exactement le commentaire. Non, moi non plus je ne comprends pas le "ECJS:E!...."au milieu. Il faut dire qu'on lui en a fait baver, ce prof étant un fou (ou justement un prof qui vit son époque ?) castrateur avéré et assumé, monarchiste, antisémite et adepte de la théorie du complot franc-maçonnique et israélite (sans rire...). Après l'agression par un pote dans sa salle, les avions, les dessins sous son nez au tableau, les gens qui se lèvent pour éteindre la télévision quand il l'allume et les concours de pompes sur son estrade, je comprends qu'il m'en veuille un peu...Surtout quand je m'oppose à sa vision ignoble du monde, une vision exactement à l'inverse de ce que j'aime.
    Je vous offre quelques perles : "Si vos parents ne vous ont pas puni et battu, ils ont eu terriblement tort" dit sur un ton énervé qui ne laissait aucune place à l'humour.
    "Votre scolarité est finie, je mets un mot dans votre dossier et votre carnet ouvrier, et vous n'aurez plus aucun emploi ni études."
    "Les pauvres, on leur donne, comme moi. On me donne. Je reste humble face aux puissants. Entre pauvres, on se comprend, hein ?"
    "Oui, ce sont des riches. Oh là ! Non, je ne vous conseille pas de faire la moindre remarque sur lui si vous alliez à un de ses diners, ou alors ne prenez pas la voiture ensuite. Des accidents sont vite arrivés, hé hé hé...Hum."
    "Les bourgeois payent pour ne pas aller à la guerre, et les pauvres y vont pour piller. Tout le monde est content."
    "Les noirs, en Amérique, descendent des montagnes."
    "Le problème, dans ce système, c'est les juifs."
    "Non, le régime de Louis XIV n'est pas totalitaire. C'est un régime sé-rieux."
    Non, il ne s'agit pas de blagues, malheureusement.

    ANGLAIS : 14,2. C'est bien, sans que ***** ait fait son maximum : capable de très bien réussir dans la matière, une réelle finesse littéraire.

    C'est quoi, "réussir", à la fin ? Avoir des notes supérieures à 15 ? Je ne pense pas qu'elle parle de faire un métier de traducteur ou des études anglophones, alors c'est quoi "réussir" ? Réussir quoi, merde ? Réussir à bien faire tous ses exercices ?

    ALLEMAND : 7,8. Résultats insuffisants. ***** semble s'être désintéressé de l'allemand ce trimestre. Le travail fut moins sérieux et l'attitude très passive.

    Cool. De toute façon j'arrête l'année prochaine, pas par choix. Et la seule raison qui m'aurait fait travailler l'allemand aurait été de parler cette langue pour faciliter des voyages en Allemagne. Vu que de toute façon je ne le parlerais pas, à quoi bon ?

    LATIN : 12,0. Peu d'investissement en latin. ***** est un élève avec de fortes capacités qui doit réussir s'il le décide !

    Ca m'a fait rire. Elle a cette espèce de moue de dépit de l'ancienne adolescente consciente, qui a eu des rêves mais s'est résignée...du moins, c'est comme ça que je l'interprète, quand je dit une chose ou une autre qui ne va pas avec ses idées purement scolaires et méritocrates de gauchiste.
    Cette prof nous a donné la "clef du bonheur" le dernier cours de l'année.
    En gros, "même si avoir un travail qui nous plaît et un gros salaire ça aide, c'est sûr, et c'est aussi pour ça qu'il faut travailler", la clef du bonheur c'est "quand on veut quelque chose, on doit tout faire, absolument tout, pour y arriver".
    Là dessus je suis d'accord, même si je sais que cette prof n'y mettra pas le même sens. Nous ferons tout, absolument tout, pour ne pas reproduire vos conneries, et pour être libres, envers et contre tout.
    Cette prof voudrait que je décide de travailler pour réussir mes études. Haha. Hahaha.
    Et d'ailleurs, je "n'investirais" mon temps nulle part dans vos actions scolaires, le cours de l'Ecole va se casser la gueule.

    MATHEMATIQUES : 11,1. Résultats convenables, sans plus. Des capacités non exploitées !

    Rien à foutre. Exploiter pour quoi faire ?


    PHYSIQUE-CHIMIE : 11,9. De moins en moins d'investissement dans la matière. Résultats en nette baisse.


    Cool aussi. Savoir mélanger C2H4 et O2 ne m'intéresse pas. Si encore on étudiait un mélange explosif...

    SCIENCES VIE & TERRE : 13,0. Des résultats écrits satisfaisants.

    Si ça vous satisfait, alors c'est bien, soyez satisfaite. Moi je ne le suis pas, j'aurais aimé approfondir les OGM au lieu de travailler les planètes et les couches spaciales.

    ED. PHYSIQUE & SPORT : 13,0. Ensemble satisfaisant.

    Tu parles. J'ai rien foutu et ma note a baissé de 4 points.

    APPRECIATION GLOBALE : Des résultats tout à fait convenables dans nombre de disciplines mais ***** refuse le cadre scolaire.

    Oui. Exactement.


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  • Il est 16h. Je dois aller voir une dame à Paris pour savoir si je suis précoce de la tête ou non.
    Je n'ai pas envie d'y aller. Moi j'ai pas envie de savoir si je suis ça ou ça. Moi je suis Soja. Je ne sais pas très bien qui je suis, mais si je suis sûr d'une chose, c'est que ce n'est pas cette dame qui m'apprendra la moindre chose. Par contre, si je pars sur la route, ça pourra me servir.

    Soit. Je me prends au mot. En 30 minutes j'ai décidé de partir, je me suis préparé et je suis parti.
    Après quelques prises de bec au téléphone, je me calme, je vais dans une forêt et je souris : le soleil fait briller les herbes folles.

    "Tu fuis ! Tu ne veux même pas aller voir ! Des fois il va falloir que tu affrontes la réalité ! Tu n'as aucun courage !" Chut. Silence.

    Je me balade.Je dors derrière une résidence pavillonaire de Poissy. Je cherche le chemin qui me mènera à la forêt, que j'aperçois derrière les pavillons de crépis alignés. Je m'installe.J'appelle Anaryax parce que je ne me rappelle plus comment nouer les ficelles du hamac. Puis le silence de la nature me rappelle. Par moment, quand même, j'entends les cris des enfants qui dînent. Ces mêmes enfants dont j'ai croisé les cabanes, un peu partout dans la forêt. Malheureusement trop petites pour me servir d'abri.

    Le lendemain je traverse un champ de coquelicot en face d'un chantier naval, j'en prends des photos. Ensuite je m'arrête aux bords de Seine pour écrire un peu.
    Je trace.
    Puis à Conflans-Ste-Honorine je longe tout le quai pour voir les péniches. Je passe devant un gros bonhomme presque nu, affalé sur une vieille chaise en face de sa péniche et en caleçon bleu. Je le salue. Je m'arrêt devant une vieille péniche apparemment désaffectée et j'hésite à aller la visiter. J'y renonce finalement, par peur de déranger si elle était habitée et parce que la barrière qui en barre l'entrée est imposante.
    Je me dis qu'on devrait squatter une péniche, vu la taille et la possibilité de bouger.

    Au bout d'une matinée de route, je manque d'eau. Ca fait 5 minutes que je tente de trouver le Leclerc que j'avais vu signalé. Je le trouve - merde. C'est un Leclerc DRIVE.
    "Il doit bien y avoir un putain de supermarché, ici !"

    J'arrête pas de passer devant un énorme cinéma PATHE, complètement gris et incroyablement grand. Au bout de 20 minutes durant lesquelles j'ai parcouru touute la zone industrielle (et un peu commerciale) derrière,  je me décide à aller voir Robin Hood. Le caissier, un jeune, me fait payer un billet -16, "oh allez on va pas chipoter..."
    Puis il me regarde et demande : "Sauf si...C'est une casquette de l'OM que tu as ?"
    "Euh...Non."
    "Bon, alors ça va."
    Il faut dire que je porte une vieille casquette avec un sigle "NY" repeint et raturé.
    Dans le cinéma il y a des distributeurs à pop-corn, des néons partout et même une salle de jeux vidéos. Génial... Je me dépèche d'aller remplir mes bouteilles d'eau et je vais m'installer dans la salle.
    Le film me donne envie de gueuler. Ce qui me plaît, ce sont les enfants des bois. Mais bon, ça sert à rien, c'est juste des images en provenance d'Hollywood. J'ai mieux à faire. Je sors.

    Arrivé à Pontoise, je m'arrête pour acheter de quoi bouffer. J'en profite pour visiter le centre-ville, c'est plein de places vides et de petites rues presque moyen-âgeuses. Ca me donne envie de visiter plus loin, mais il faut que je trouve une forêt avant la nuit.

    Je sors de la ville en direction de la campagne, et je croise des fermes absurdes à quelques minutes de vélo du centre-ville urbanisé. Il y a même une Porsche arrêtée devant l'une d'elle. Je crache dessus. Ca défoule quand on est fatigué.

    Je trouve un champ en friche, j'y entre immédiatement. Je m'y allonge. Je suis entouré d'herbes hautes, loin de leurs merdes...Tiens, qu'est-ce qui passe là-haut ? Un avion. Une longue traînée de pétrole consumé déchire le ciel. Tout mon bonheur s'écroule. Qu'est-ce que je croyais ? Le truc c'est pas essayer d'échapper, c'est de lutter contre. Même ici, leur merde me rattrape.
    Je me relève. Un bruit d'herbes qu'on piétine furieusement derrière moi. Une biche jaillit des herbes hautes et s'enfuit par grands bonds dans le pré. Sa silhouette se découpe sur le ciel où le Soleil commence à se coucher. C'est beau. J'ai l'impression de vivre la scène dans le film "Into The Wild", quand Alex regarde des rennes avec des larmes aux yeux. Putain j'ai bien fait de faire ça.
    Je vis chaque moment.

    Je monte une colline entourée de champs à perte de vue. Au fur et à mesure que je pédale je vois se dévoiler une immonde tour HLM, du genre toute grise et très vieille, dressée au milieu de nulle part. Sans rien ni personne autour. Tellement grise que je crois un moment qu'elle est abandonnée.
    Là je croise un vieil homme qui promène son chien. Il me demande si je prends des photos, on parle un peu. Quand je prends mon vélo pour chercher le coin qui m'abritera, il me croise une seconde fois et découvre que je suis un "randonneur". "C'est toujours mieux que de faire des conneries, hein" me lance-t-il avec des yeux tristes.

     Je repars encore, je longe un espèce de camp militaire (ou une prison, je sais pas...de toute façon, ça revient au même) avec no man's land, caméras, barbelés et murs grillagé de 15 mètres. C'est terrifiant, y'a pas la moindre humanité, pas la plus petite silhouette humaine. J'accélère.

    En face de moi s'étale en lettres énormes "CENTRE COMMERCIAL E.LECLERC".
    J'y vais me ravitailler, c'est tellement grand que je devine à peine les gens de l'autre bout du rayon !

    Je préfère la forêt, je me dépèche de quitter ces enseignes clignotantes.

    Je trouve un petit bois en pente, j'accroche avec difficulté mon hamac sur les troncs trop lisses. Je fais un feu et j'y fais chauffer une conserve de raviolis. J'écoute des jeunes du coins passer en parlant de filles, les cris des enfants qui jouent dans les jardins familiaux pas loin, les bruits des mobs, les hululements, le silence enfin.

    Il ne manque qu'un présence avec qui le partager, ce bonheur qui m'envahit. Les potes, un amour, ou au moins quelqu'un.

    Je dors. Il fait chaud. Dans les arbres, un trou dans le feuillage a la forme d'un visage.

    Le lendemain, je me lève avec des boutons pleins le corps. J'aurais pas dû dormir en t-shirt.

    Quelques gouttes.
    J'entends un énorme craquement tout proche de moi ; c'est l'orage. Merde. Je me dépèche de ranger, et quand je sors du bois, je me prends une douche phénoménale. Waouh, ça refroidit sacrément l'enthousiasme, le bien-être, tout ça. Après avoir pataugé dans la boue du chemin forestier, je sors de la campagne, je rejoins Pontoise. Pontoise grise et vide sous la pluie battante. Je suis tellement mouillé que je ne sens plus le froid. Je pédale.

    Je croise une Merco dans une rue froide, je tente d'arracher son sigle, en vain. Je découvre que c'est flexible et que le support peut pivoter. Ca sera plus dur que je ne le pensais de m'en faire un pendentif.

    Je pédale une heure sur une départementale parcourue par des centaines de voitures. Il pleut, je galère, c'est dur. Je me perds souvent, je me rends compte à plusieurs reprises que j'ai fait demi-tour, plusieurs bagnoles me frôlent. Déjà qu'en voiture c'est laid, en vélo c'est vraiment ignoble, surtout quand la pluie se déchaîne.

    Je sens la crise de nerfs arriver. Je commence à chanter ce qui me passe par la tête. Le punk ou la oi!, c'est vraiment pas facile à chanter seul et sans musique. Tant pis, je vais chanter du Léo Ferré.

    Les "Putain ça fait CHIER" lancés aux conducteurs aveugles se transforment en "ILS SONT PAS UN SUR CENT, ET POURTANT..."
    Je n'arrête pas de voir des publicités pour restaurant, établissements de massages, parcs, zoos ou sex-shops.
    Jamais de panneaux de villes.
    "Mais qu'est-ce que j'en ai à foutre de la Cité de l'Auto, bordel ?!"
    Après avoir fait le tour d'une zone industrielle et croisé deux skins, je retrouve mon chemin. Ou plutôt ma route.

    Sur un marché j'achète deux pommes et j'en profite pour discuter avec la vendeuse. Elle a l'air déçue de savoir que je ne viens pas de très loin. Elle m'aide à ranger les pommes dans mes sacoches, puis encore un "au revoir, bonne journée", j'enfourche mon compagnon d'route et je repars.

    Je suis seul et de nouveau sur une nationale. Il bruine, et je suis crevé. L'énervement est parti, la mélancolie arrive. Je vais devoir rentrer, malgré la terrible envie de rester là, à pédaler, toujours le regard sur l'horizon d'en face, et d'écrire ça dans un quelconque cybercafé.

    Je croise un type trop grand pour son mini-vélo, qui roule à contresens sur une départementale bondée avec un sweat gris sur lequel il a graffé des mots en grandes lettres. Je déchiffre "BALANCE" et "ZA".
    Il débite en gueulant des textes de rap avec une grosse voix et me regarde derrière ses lunettes de soleil et son bob en cuir.
    Pendant un temps je l'observe s'éloigner et je passe en revue ce que j'ai bien pu manger ses derniers temps pour voir des choses pareilles. Mais non, il a l'air bien réel. Je continue.

    En longeant une forêt je vois beaucoup de sacs plastiques et mon regard s'assombrit, comme d'habitude. Je dépasse les premières voitures arrêtées sans vraiment les regarder, je m'enferme plus profondément dans mon armure et mon visage devient un masque de détermination triste. Les premières prostituées, presque toujours en mini-jupe et à la peau mate, me voient passer. J'ai le temps de deviner l'une d'entre elles en pleine action. J'ai la nausée.
    C'est fait sans aucune gène, les gens s'arrêtent et tirent leur coup. Je pourrais relever les numéros d'immatriculation des "clients". Peut-être un Ministre ou quelqu'un d'important, qui sait ? En R5, ça m'étonnerait, m'enfin tout est possible.

    Sous un pont il y a dix caravanes arrêtées. Des enfants et des adultes déambulent autour. Ils sont pratiquement en haillons.C'en est à se demander, sinon à quelle époque, du moins dans quel pays on est.
    Liberté, égalité, fraternité. Ils se foutront encore longtemps de notre gueule ?

    Toujours plus loin, je croise un poteau sur lequel sont accrochées plusieurs directions.
    Le panneau le plus en haut indique "<--- Mac Donald's"
    Le panneau d'en dessous indique : "Mac Donald's --->"
    Quelle merde...

    Ca y est, je me décide à rentrer. En attendant de ne plus avoir à le faire.

    "Bon, on a vu que tu avais du courage. Si, si, aller comme ça, seul, en forêt pendant 3 jours...On sait pas si on aurait osé, nous..."

    Oui. Ca vous fascine, ça. La liberté et l'absence de recherche de sécurité.


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